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DES GALAXIES PRIMORDIALES AU QUINTETTE DE STEPHAN AVEC LE TÉLESCOPE SPATIAL JAMES WEBB

Deux programmes d’observation avec le nouveau télescope spatial James Webb (JWST), dirigés par des chercheurs de l’IAP, ont été octroyés dans le cadre du 2ème cycle d’observations. Le premier est l'un des plus conséquents avec 148 heures d’observation des galaxies primordiales de l’Univers avec l’instrument NIRCam. Le but de ce programme est de comprendre les conditions qui favorisent et celles qui empêchent la formation des premières galaxies. Le second programme d’observation consiste à observer le Quintette de Stephan, un groupe de galaxies en interaction, pendant 23 heures avec l’instrument MIRI. L’objectif de ce programme est d’élucider pourquoi cette fusion de galaxies ne déclenche pas une flambée de formation d’étoiles, comme on pourrait s’y attendre.

Figure 1 : l’amas de galaxies Abell S1063 Figure 1 : L’amas de galaxies Abell S1063 observé par le télescope spatial Hubble dans le cadre du programme « Frontier Fields ».
Crédit : NASA, ESA, et J. Lotz (STScI)

Le programme « JWST's GLIMPSE: gravitational lensing & NIRCam imaging to probe early galaxy formation and sources of reionization », dirigé par Hakim Atek de l’Institut d’astrophysique de Paris, a bénéficié de 148 heures de temps d’observations avec la caméra NIRCam du télescope spatial James Webb (JWST), afin d'obtenir les observations les plus profondes du ciel jamais réalisées. C'est l'amas de galaxies Abell S1063 (voir Figure 1), situé à une distance de 4.5 milliard d'années-lumière de la Voie Lactée, qui sera scruté. L'effet de lentille gravitationnelle de cet énorme concentration de masse sera utilisé pour amplifier la lumière des galaxies distantes d’arrière-plan : l'amas agit comme une loupe cosmique et rend plus lumineuses des galaxies plus lointaines situées en arrière-plan de l’amas, de sorte qu'elles deviennent visibles. Certaines images sont fortement déformées par l’effet de lentille gravitationnelle et apparaissent comme des arcs (voir Figure 1). Les astronomes de la collaboration GLIMPSE se lanceront à la recherche des premières galaxies formées dans l'Univers quelques centaines de millions d'années après le Big Bang, et mille fois moins lumineuses que la Voie Lactée (appelées galaxies « primordiales »). Leur objectif est de mieux comprendre les mécanismes de formation et d'évolution des galaxies primordiales, ainsi que leur rôle pendant la période dite de « réionisation », au cours de laquelle la quasi-totalité de l'hydrogène neutre qui emplissait l'Univers a été ionisée par des objets qui restent encore à déterminer. Les observations du programme GLIMPSE se dérouleront sur une période d’environ un an à partir du mois de septembre 2023. La collaboration du programme est constituée également d’Iryna Chemerynska, doctorante à l’IAP, de Lukas Furtak, ancien doctorant de l’IAP (actuellement en Israël), de chercheurs du Centre de Recherche Astrophysique de Lyon, ainsi que des chercheurs et chercheuses de laboratoires en Suisse, au Danemark, et aux Etats-Unis d’Amérique.

Le programme « Shaken and stirred », dirigé par Philip Appleton (Califormia Institute of Technology, Pasadena, Californie), et co-dirigé par Pierre Guillard de l’Institut d’Astrophysique de Paris et Bjorn Emonts (National Radio Astronomy Observatory, Charlottesville, Virginie), bénéficiera de 23 heures d'observations avec le spectrographe à intégrale de champ de l’instrument MIRI à bord du télescope spatial James Webb (JWST), afin d’observer un groupe de galaxies, le « Quintette de Stephan », situé à une distance de 270 millions d'années-lumière de la Voie Lactée. Dans ce groupe, deux galaxies sont entrées en collision à grande vitesse (plusieurs centaines de kilomètres par seconde), ce qui conduira à terme à leur fusion en une seule galaxie. L'énergie mécanique de cette collision induit une multitude de chocs dans le milieu gazeux situé entre les galaxies. Ce milieu est hétérogène, constitué de gaz très diffus subissant des chocs à grande vitesse et à très hautes températures (plusieurs millions de degrés), mais aussi de gaz d’hydrogène plus dense, soumis à des chocs à des vitesses plus basses, qui peut ensuite se refroidir sous l’effet de la compression (à environ -100 degrés Celcius) et former de grandes quantités de la molécule de dihydrogène, H2 (voir Figure 2). Contre toute attente, très peu d'étoiles se forment dans la région du choc, alors qu'en général les fusions de galaxies déclenchent des flambées de formation d’étoiles à partir du gaz moléculaire froid. Ce sont probablement les mouvements turbulents[1] du gaz, et les grandes variations dynamiques et thermiques que cela induit, qui empêchent le gaz de former des étoiles. L’objectif de ce programme d’observation est de comprendre comment de grandes quantités de gaz moléculaire, mais peu d'etoiles, peuvent se former dans un milieu gazeux subissant un choc à grande vitesse. L’observation avec l’instrument MIRI de six régions identifiées comme turbulentes permettront aux chercheuses et chercheurs de déterminer précisément la masse, la température et les mouvements d'ensemble du gaz moléculaire dans ces régions (voir Figure 2). La collaboration est consitutée de chercheurs et d'une chercheuse de l'Ecole Normale Supérieure et de l’Observatoire Astronomique de Strasbourg, ainsi que de chercheurs et chercheuses de laboratoires en Espagne, au Canada, et aux Etats-Unis d’Amérique.

Note

[1] La turbulence est caractérisée par des fortes variations en intensité et direction de la vitesse mesurée en tout point d'un fluide, conduisant à une apparence fortement désordonnée à de nombreuses échelles spatiales et temporelles.

Figure 2 : le groupe de galaxies du Quintette de Stephan
Figure 2 : Le centre du groupe de galaxies le « Quintette de Stephan » observé avec les caméras MIRI et NIRCam du JWST. Les galaxies NGC 7319 et NGC 7318b sont en cours de fusion, créant un choc dans le milieu intergalactique. On voit entre ces deux galaxies, en rouge, l’émission de la molécule de dihydrogène, H2. Les inserts (en bas) montrent trois des six régions qui seront observées avec l’instrument MIRI du JWST afin de mesurer la dynamique de ce gaz et sa température.
Crédits : NASA, ESA, et P. Guillard (IAP)

Information sur les programmes d’observation :

puce Le programme « JWST's GLIMPSE: gravitational lensing & NIRCam imaging to probe early galaxy formation and sources of reionization » (en français : « Aperçu de JWST : effet de lentille gravitationnelle et imagerie NIRCam pour sonder la formation des premières galaxies et les sources de la réionisation »)

puce Le programme « Shaken and stirred » (en français : « Secoué et remué »)

Liens

puce Le JWST sur le site internet de l'ESA (en anglais)

puce Le JWST sur le site internet de la NASA (en anglais)

puce Le site internet francais officiel du JWST

Rédaction et contacts

Rédaction web : Valérie de Lapparent

Mise en page : Jean Mouette

Juin 2023

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